Tout savoir sur Manifold Learning

L’un des défis rencontrés dans le domaine du Machine Learning et de l’intelligence artificielle est lié à l’analyse de données complexes. Les ensembles de données peuvent être constitués de millions de points, chacun représentant une observation avec de nombreuses variables. Une telle dimensionnalité va compliquer l’apprentissage de modèles efficaces et l’interprétation des résultats. C’est dans ce contexte qu’intervient le Manifold Learning, une approche puissante qui va permettre de réduire la dimensionnalité des données en préservant leur structure intrinsèque.

 

Manifold learning et réduction de dimensionnalité

En mathématique les manifolds sont des objets ressemblant localement à l’espace euclidien, mais pouvant avoir une structure globale plus complexe. Il peut s’agir d’une courbe, d’une surface ou d’une forme plus générale, qui peut être pliée ou tordue dans des dimensions supérieures.

Le manifold learning, ou apprentissage des variétés en français, est une technique de Machine Learning visant à identifier une représentation de dimension inférieure d’un dataset de haute dimension. Cette représentation, appelée variété, capture les caractéristiques et les relations essentielles des données tout en éliminant le bruit et les dimensions redondantes. Ce processus vise à découvrir et à exploiter les structures non linéaires ou non euclidiennes des données.

 

Quelle est la théorie fondamentale du Manifold Learning ?

La théorie fondamentale du manifold learning repose sur le postulat que les données complexes de haute dimension sont plus efficacement représentées dans un espace de dimension inférieure, qui capture la structure sous-jacente du manifold sur lequel ces données sont distribuées.

La structure intrinsèque des données

Les données complexes sont souvent distribuées sur des variétés de dimension inférieure au sein d’un espace de grande dimension. Ainsi, une courbe dans un espace tridimensionnel pourrait être représentée comme une variété de dimension 1, ce qui simplifie la représentation des données.

L’hypothèse de localité et linéarité

Une des hypothèses clés est que les manifolds sont localement linéaires. Les relations entre les données dans de petites régions autour de chaque point peuvent donc être approximées par des relations linéaires. Cette approche permet de capturer facilement des relations non linéaires globales à partir des données locales.

L’utilisation de la distance géodésique

Dans un espace de grande dimension, le manifold learning utilise des distances géodésiques plutôt que des distances euclidiennes. Elles mesurent la distance le long du manifold, de manière à mieux représenter les relations structurelles entre les données tout en tenant compte de sa géométrie intrinsèque.

Les méthodes spectrales pour l’extraction de dimensions

Ces techniques impliquent l’utilisation de valeurs et de vecteurs propres, de façon à représenter les données de manière optimale dans un espace de dimension plus faible. De cette manière, la réduction de dimension est facilitée et la structure complexe des données, préservée.

Différence avec l’apprentissage supervisé et non supervisé ?

L’apprentissage supervisé et non supervisé sont des approches de Machine Learning classiques. Si le premier apprend à partir de données étiquetées pour prédire des sorties, le second cherche à capturer des patterns dans des données non étiquetées. On peut situer le Manifold Learning entre les deux techniques. Celui-ci n’exige pas d’étiquettes, mais exploite les relations locales entre les points de données afin de découvrir la structure intrinsèque des données.

 

Quelles sont les principales techniques de manifold learning ?

De nombreuses techniques de manifold learning ont été développées dont les plus populaires sont :

  • Isomap, une méthode qui utilise le calcul des distances géodésiques pour construire un graphe des données et identifier la variété sous-jacente ;
  • Locally Linear Embedding, ou LLE, qui représente la structure locale des données en reconstruisant chaque point comme une combinaison linéaire de ses voisins ;
  • t-Distributed Stochastic Neighbor Embedding, ou t-SNE, qui utilise une approche probabiliste afin de projeter les données dans un espace de dimension inférieure en préservant les distances locales ;
  • Multidimensional Scaling, ou MDS, qui minimise une fonction de coût basée sur les distances entre les points de données afin d’identifier la configuration optimale dans l’espace de dimension inférieure.

 

Zoom sur l’Isomap, une des méthodes les plus populaires

L’Isomap, ou Isometric Mapping, est l’une des techniques les plus largement utilisées pour la réduction de dimensionnalité et la représentation de données complexes.

Fonctionnement de l’Isomap

Il s’agit de capturer la structure intrinsèque d’un data set en modélisant les relations géométriques entre les points de manière non linéaire. L’Isomap utilise ainsi les distances géodésiques afin de mesurer la similarité entre les points de données. Celles-ci sont calculées en suivant les chemins les plus courts le long du manifold, ce qui permet de prendre en compte la géométrie sous-jacente plutôt que la distance euclidienne dans des espaces de grande dimension.

Pour chaque point de données, l’algorithme identifie ses voisins les plus proches en utilisant des mesures de distance. En utilisant ces voisins, il calcule les distances géodésiques entre tous les points. Il utilise pour cela des méthodes comme l’algorithme de Dijkstra. L’Isomap applique ensuite une technique de plongement de manifold, souvent basée sur la décomposition en valeurs propres de la matrice des distances géodésiques. 

Les avantages du modèle Isomap

Cette méthode polyvalente est particulièrement efficace dans la capture des structures non linéaires complexes. Elle permet de représenter des relations spatiales ou temporelles qui ne seraient pas correctement modélisées par les méthodes linéaires traditionnelles. Elle est vde plus très robuste face aux distorsions de data, car elle est moins sensible aux données bruitées ou aux projections linéaires insuffisantes.

 

Une méthode efficace sur certains types de données

Le manifold learning est particulièrement adapté aux données présentant une structure intrinsèque de dimension faible, et ce même si elles sont représentées dans un espace de haute dimension.

Le cas des données non linéaires

Contrairement aux méthodes traditionnelles comme l’ACP qui supposent des relations linéaires entre les variables, le manifold learning peut représenter efficacement des structures non linéaires, comme des courbes ou des clusters en forme de spirale.

Dans le cas de données présentant des corrélations non linéaires entre variables, il est capable de capturer fidèlement des relations intrinsèques. Des techniques comme Isomap ou LLE permettent de découvrir les variétés sous-jacentes sur lesquelles les données sont distribuées. La représentation dimensionnelle est réduite tout en préservant la structure complexe de la data.

Les ensembles de données de haute dimension

Lorsque les ensembles de données présentent un grand nombre de variables, il est nécessaire de réduire sa dimension pour l’analyse et la visualisation. Cette approche robuste va permettre de réduire la dimensionnalité en conservant les informations importantes. Elle exploite la structure sous-jacente de la data, afin de créer une représentation plus compacte et significative.

L’exploration des structures de faible dimension

Il arrive souvent que les données réelles se trouvent sur des variétés de dimension inférieure dans un espace de grande dimension. Une surface courbe en 3D peut par exemple être vue comme une variété de dimension 2. Le manifold learning s’avère alors particulièrement utile pour explorer et modéliser ces structures plus simples de manière efficace tout en représentant des relations complexes entre les données. L’application de méthodes comme t-SNE va permettre de projeter les données dans un espace réduit tout en conservant les distances locales et la géométrie intrinsèque du manifold.

Les modèles spatiaux et temporels complexes

Dans certains domaines, les données sont plus susceptibles de présenter des relations spatiales ou temporelles complexes. Le manifold learning permet d’extraire des caractéristiques pertinentes. C’est le cas dans l’imagerie médicale, la vision par ordinateur ou encore l’analyse de réseaux.

En imagerie médicale, chaque image peut être vue comme un point dans un espace de grande dimension. L’application du modèle va permettre de regrouper des images similaires tout en maintenant leur structure spatiale. De la même manière, lorsque les données sont collectées à des intervalles réguliers, comme dans l’analyse de séries temporelles, il va révéler des patterns complexes et des tendances sous-jacentes difficilement perceptibles. 

 

Quelles sont les applications du Manifold Learning dans le monde réel ?

Cette technique d’Intelligence Artificielle trouve des applications dans de nombreux domaines.

La vision par ordinateur

Les techniques de Manifold Learning permettent aux machines d’identifier et de classer des objets dans une image, même si celle-ci est déformée ou présente des variations d’éclairage. De la même manière, un système de surveillance va s’appuyer sur ce type d’algorithmes pour détecter des anomalies dans des images. Cela permet d’identifier des situations potentiellement dangereuses ou nécessitant une attention particulière. 

Ce processus est également très utile en segmentation des images. En isolant le premier plan et l’arrière-plan, il facilite les analyses. Cela s’avère particulièrement efficace en médecine, pour l’analyse d’images d’organes ou de tissus.

L’analyse de texte et le traitement du langage naturel

Il facilite la classification et l’organisation de grandes quantités de textes, notamment dans les domaines de la recherche documentaire et de la gestion de l’information. De plus, il est possible d’extraire des informations spécifiques, comme des noms d’entités ou des dates, y compris à partir de documents complexes et de textes volumineux. Ces méthodes sont utiles en traitement du langage naturel pour automatiser l’extraction de données pertinentes.

On utilise également ce type d’algorithme pour analyser les sentiments contenus dans un texte. Cela offre une meilleure lecture des opinions et des attitudes exprimées dans des documents, des articles ou même des discussions en ligne.

La bio-informatique

Ce type de Machine Learning est particulièrement efficace pour analyser des données génomiques complexes. Il offre également de précieux outils en médecine personnalisée et en prévention des maladies et contribue à une meilleure compréhension des maladies et au développement de nouveaux traitements.

La recommandation de produits

Les systèmes de recommandation de produits peuvent s’appuyer sur ces techniques pour suggérer à un client des articles pertinents en fonction de ses achats et de ses préférences.

La robotique

Ces algorithmes d’Intelligence Artificielle permettent de planifier des trajectoires pour les robots. Ils peuvent alors éviter les obstacles et atteindre leurs objectifs en optimisant leurs déplacements. Les mouvements sont également plus naturels et fluides.

 

Le Manifold Learning représente une avancée significative dans le domaine de la réduction de dimensionnalité. En s’appuyant sur ses principes théoriques et ses techniques pratiques, les chercheurs, les Data Scientists et les experts du Machine et du Deep Learning peuvent surmonter les problématiques liées aux ensembles de données complexes.