4 mai 2020

StopCovid : L’application de tracking qui dérange ?

Si, dans ses dernières annonces du 28 avril dernier, le premier ministre Edouard Philippe a annoncé que le débat sur l’application qui trace les chaînes de transmission du virus Covid-19 n’était pas “à l’ordre de jour”, StopCovid reste un sujet houleux. En effet, les passions se déchaînent autour de cette application, car elle soulève la questions des exploitations des données, et donc de la violation des libertés individuelles. Car préparer le déconfinement des français est une épreuve de taille qui doit répondre à un défi : trouver des solutions pour freiner la propagation de l’épidémie et éviter un rebond, sans pour autant porter atteinte aux libertés fondamentales des citoyens. Petit point sur la situation à ce jour.

Une application de tracking qui veut limiter la diffusion du Covid-19

Qu’est ce que l’application StopCovid ? StopCovid propose de casser les chaînes de transmissions en s’appuyant sur la technologie du “back-tracking” : cette technique consiste à identifier tous les contacts récents d’une personne infectée par le biais de son téléphone. Concrètement, comment ça marche ? Chaque utilisateur a un identifiant unique qui pourra être détecté par les autres mobiles à proximité. L’application enregistre un historique de tous les identifiants captés au cours d’une période de 15 jours, ainsi que la puissance du signal – ce qui permet d’évaluer la distance. Lorsqu’un utilisateur est testé positif au Covid-19, il doit le signaler à l’application. L’information remonte alors à tous les autres utilisateurs rencontrés, grâce à un message d’alerte qu’ils reçoivent sur leurs téléphones.

Dans quel but ? Prévenir les personnes qui ont été en contact avec une personne infectée, afin qu’elles puissent se faire tester elles-même, et être prises en charge très tôt si besoin. Ainsi, la chaîne de transmission est limitée.

Bluetooth et volontariat : deux caractéristiques de l’appli questionnées.

Le gouvernement l’a indiqué : cette application va s’appuyer sur le Bluetooth, car c’est une technologie sans fil moins intrusive que la géolocalisation. Le bluetooth permet de transformer notre smartphone en émetteur-récepteurs de signaux. Ce choix questionne sur son efficacité : en effet, difficile d’être précis avec une telle technologie, qui dépend de nombreux facteurs. Modernité du modèle du téléphone, contexte dans lequel le signal est capté, distance réelle entre les personnes et donc probabilité d’être infectée, etc… autant de points qui rendent la collecte de données en bluetooth assez opaque.

De plus, cette technique bluetooth est non compatible avec les Iphones, qui représentent plus de 20% des téléphones des français. L’ Etat se retrouve en grande difficulté face à Apple et Google, qui ont lancé tous deux leur solution de tracking, qui vient d’être adoptée notamment par l’Allemagne.

Deuxième point annoncé par le gouvernement : cette application fonctionnera sur la base du volontariat, et pourra être désinstallée à tout moment. Or, pour que cette application soit efficace, il faudrait qu’elle soit installée rapidement et quasiment simultanément par 70 à 75% de la population française. Encore une donnée qui peut questionner sur son efficacité.

StopCovid : compatible avec le RGPD ?

Les peurs qu’une telle application voit le jour sont multiples, et impliquent bien entendu le sujet délicat de la collecte des données. Si la CNIL a annoncé que ce dispositif était “conforme au règlement général de la protection des données (RGPD)”, elle a bien précisé que cela était le cas, uniquement si certaines conditions étaient respectées (source). Par exemple, elle demande à ce que le caractère exceptionnel de ce type d’application de tracking soit inscrit dans le droit national. Afin d’éviter que cela ne s’étende à d’autres applications dans l’avenir, mais aussi que le traçage de la population ne déborde pas du cadre de l’épidémie.

Si l’usage de la technologie en cette période est indispensable et représente une aide véritablement précieuse : comme le recours à l’Open Data, l’Intelligence Artificielle, ou encore le mouvement makers – il ne faut pas oublier les droits fondamentaux de chaque citoyen ! L’application pensée pour tracer les Français en contact avec les personnes contaminées pourrait bien rester dans les tiroirs.

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